Aujourd’hui un petit billet sur un mode dont l’emploi ne coule pas de source, même si on l’emploie régulièrement sans nous en rendre compte.
Le subjonctif est donc un mode, composé de quatre formes temporelles : le présent, le passé, l’imparfait et le plus-que-parfait du subjonctif, les deux dernières étant d’un usage aujourd’hui assez peu courant et très littéraire.
Je ne vais pas revenir sur la construction de ces temps, vous pourrez la trouver assez facilement sur le net ou dans un bon livre de conjugaison, et d’ailleurs, ce n’est pas le but de cet article.
Je souhaiterais me pencher davantage sur l’utilisation de ce mode : quand l’employer, et les expressions qui appellent nécessairement son emploi.
QUAND EMPLOYER LE SUBJONCTIF ?
Contrairement à l’indicatif, le subjonctif revêt une maigre aptitude temporelle, c’est-à-dire qu’il ne sert pas spécifiquement à placer un verbe dans le temps. Le présent du subjonctif peut ainsi avoir une fonction de futur dans certains emplois.
On lit souvent que le subjonctif serait tout d’abord le mode de l’action irréelle, imaginaire, ce qui n’est pas toujours le cas, ne serait-ce que sur ce simple exemple : « Je suis très heureuse que mon amie soit présente ». Ici, le présent du subjonctif « soit » n’a rien d’irréel.
Certes, globalement, le subjonctif servirait surtout à exprimer le doute, l’incertitude, et donc une action qui ne s’est pas encore déroulée. Il exprime ainsi l’envie, le souhait, l’obligation, l’émotion, etc. En voici quelques exemples :
- J’aimerais tant qu’il soit là ;
- Puisses-tu être heureux !
- Il est possible que cette équipe remporte le match (subj. présent du 1er groupe).
On peut distinguer deux valeurs principales du subjonctif :
- Valeur optative ou expression d’un souhaite : « je rêve que le monde soit heureux » ;
- Valeur d’injonction : « je veux que tu sortes d’ici ! » ;
Aparté : même s’il s’agit à l’origine d’un subjonctif, la locution « vive ! » est aujourd’hui figée et ne s’accorde plus aujourd’hui avec son sujet : vive les vacances ! Même si « vivent les vacances » n’est pas en soi une faute…
On rencontre ainsi fréquemment le subjonctif dans les propositions subordonnées et notamment celles introduites par « afin que », « bien que », « à condition que », « quoique », etc. Nous dresserons une liste complète plus loin.
Le subjonctif est d’emploi obligatoire après un certain nombre de verbes, dont voici la liste :
Aimer ; approuver ; attendre ; avoir envie ; craindre ; défendre ; demander ; douter ; s’étonner ; exiger ; faire attention ; falloir ; importer ; interdire ; ordonner ; être nécessaire ; décider ; permettre ; préférer ; prendre garde ; refuser ; regretter ; souhaiter ; tenir à ; vouloir ; douter ; décréter.
- J’aime qu’il soit à mes côtés ;
- Je crains qu’il soit parti ;
- Je refuse qu’il vienne ;
- Je regrette qu’il pense cela de moi ;
Le choix du temps parmi ceux du subjonctif dépendra pleinement du temps de la proposition principale :
- « Je souhaite qu’elle vienne à ce rendez-vous » : la principale est au présent de l’indicatif, on prend alors le présent du subjonctif. On peut également employer le passé du subjonctif dans certains cas, la distinction ne sera pas alors temporelle mais davantage formelle : « j’exige que tu aies bu ton médicament ».
- « Je souhaitais qu’elle vînt à ce rendez-vous » : ici, la principale est à l’imparfait, on doit alors employer l’imparfait du subjonctif ; le plus-que-parfait est aussi possible mais d’un usage moins usuel : « je souhaitais qu’elle fût venue ».
LES EXPRESSIONS APPELANT LE SUBJONCTIF
Elles sont nombreuses, en voici une liste :
Avant que ; bien que ; quoique ; à condition que ; afin que ; à moins que ; de crainte que ; de façon que ; de peur que ; en admettant que ; pour que ; pour peu que ; pourvu que, sans que ; encore que, jusqu’à ce que ; non que ; si tant est que ; supposé que ; quelque… que ; ce n’est pas que.
Pour d’autres, le subjonctif est courant mais pas obligatoire, telles que :
De façon que ; de manière que ; au lieu que ; de sorte que ; moyennant que ; pour autant que, etc.
Attention, « après que » appelle l’indicatif ! En effet, le fait est accompli et donc hors du cadre du subjonctif.
- Je rentrerai après que la soirée sera terminée.
- Après que le pilote fut sorti des décombres, il sera transporté à l’hôpital ;
- Après qu’il eut fini de parler, on l’applaudit.
À ne pas confondre ces temps avec le plus-que-parfait du subjonctif…
Pour terminer, je me permettrai d’adjoindre un petit poème d’Alphonse Allais, La complainte amoureuse, qui fait la part belle au subjonctif (et au passé simple…) :
Oui, dès l’instant que je vous vis,
Beauté féroce, vous me plûtes ;
De l’amour qu’en vos yeux je pris,
Sur-le-champ vous vous aperçûtes ;
Mais de quel air froid vous reçûtes
Tous les soins que pour vous je pris !
En vain je priai, je gémis :
Dans votre dureté vous sûtes
Mépriser tout ce que je fis.
Même un jour je vous écrivis
Un billet tendre que vous lûtes,
Et je ne sais comment vous pûtes
De sang-froid voir ce que j’y mis.
Ah ! fallait-il que je vous visse,
Fallait-il que vous me plussiez,
Qu’ingénument je vous le disse,
Qu’avec orgueil vous vous tussiez !
Fallait-il que je vous aimasse,
Que vous me désespérassiez,
Et qu’en vain je m’opiniâtrasse,
Et que je vous idolâtrasse
Pour que vous m’assassinassiez !